Ambiance
Dans le tout petit matin, avec une ultime avarie à négocier – le bout-dehors, Thomas Ruyant a coupé la ligne d’arrivée dans une mer cassante et la pleine obscurité. Le Nordiste, contraint d’abandonner il y a quatre ans dans des conditions dramatiques, signe cette année un magnifique tour du monde.
La course de Thomas
Un gars en « Nord », un chouette projet d’insertion, un nouveau bateau dessiné par Guillaume Verdier, construit en Italie et mis à l’eau en 2019… Thomas Ruyant était attendu sur ce 9e Vendée Globe. Parce qu’il est un navigateur qui ose, bercé hors des sentiers battus, à Lorient plutôt qu’à Port-La-Forêt, parce qu’il avait démontré sur les courses d’avant-saison une incroyable faculté à tenir la dragée haute et à tenter des coups, le Dunkerquois partait le 8 novembre dernier avec le souffle puissant de milliers de supporters. Il démarrait d’ailleurs en fanfare : premier à aller chercher le premier front, à entrer dans le dur, il est l’homme de tête du groupe de l’Ouest à ne rien craindre de la grosse dépression Thêta. Ruyant vient pour la gagne et ne mâche pas ses trajectoires dans le sillage d’Alex Thomson : il est 3e au moment de parer les îles du Cap-Vert, puis 2e au passage de l’équateur aux trousses du Britannique. « On se tire la bourre, c’est stimulant, les vitesses frôlent les 25 nœuds », confiait-il à la vacation du 21 novembre en plein Atlantique Sud, depuis la tête de course, 10 milles devant Charlie Dalin. Dans le même temps, Ruyant perd un adversaire de taille : Alex Thomson est ralenti par son avarie structurelle conséquente laquelle, ajoutée à un choc avec un OFNI, le contraindra à abandonner une semaine plus tard. Mais le 25 novembre, Thomas Ruyant subit une grosse avarie de foil bâbord et se voit dans l’obligation de le couper, suspendu depuis l’outrigger, armé d’une scie sabre.
LinkedOut continue sa course avec moins de puissance en tribord amures. « Il s’agit de naviguer différemment et de réapprendre », confiait Ruyant après le passage du cap de Bonne-Espérance en 2e position. Thomas reste malgré tout devant, non loin de Dalin, titillé par Louis Burton et avec une meute aux trousses. Mais il parvient à reprendre les commandes après le cap Leeuwin. Et c’est un nouveau problème qui marque la course de LinkedOut : une importante voie d’eau dans la soute fait perdre 4 heures au Nordiste, suffisamment pour laisser passer Yannick Bestaven. « J’ai eu la sensation de gérer des soucis techniques et de courir après quelque chose suite à mon épisode de voie d’eau. J’ai sans cesse essayé de raccrocher le wagon sans y arriver », confiera-t-il plus tard après le passage du Horn, en 3e position.
Il ose une fois de plus une option tranchée dans la remontée de l’Atlantique Sud parce qu’il se dit « joueur », poursuit sa folle remontée dans le groupe de tête. Thomas Ruyant, jusqu’au bout, aura été présent chez les leaders – 72 % du parcours dans le trio de tête ! –, sans jamais parvenir à faire la différence après son avarie de foil, naviguant à cloche-pied, mais toujours avec le sourire, l’envie et surtout une grande régularité.
Les statistiques de Thomas Ruyant
Distance réellement parcourue : 29175,51 milles à 15,07 nœuds de moyenne.
Les grands passages
Equateur (aller)
2e le 18/11/2020 à 19h08 UTC après 10j 05h 48 min de course
Cap de Bonne Espérance
2e le 1/12/2020 à 13h41 UTC après 23j 00h 21min de course
Cap Leeuwin
2e le 13/12/2020 à 14h37 UTC après 35j 01h 17 min de course
Cap Horn
3e le 04/01/2021 à 00h40 UTC après 56j 11h 20min de course
Equateur (retour)
4er le 16/01/2021 à 23h05 UTC après 69j 09h 46min de course
Nombre de classements en tête (référence pointages Vendée Globe)
Phases leader
21 novembre 4h UTC au 23 novembre 8h UTC (1j 04h)
15 décembre 17h UTC au 16 décembre 8H UTC (1j 4h)
Meilleure distance sur 24h :
21 novembre, 518,08 milles à 21,6 nœuds (Atlantique Sud)
Son bateau
LinkedOut, plan Guillaume Verdier, construction Persico (Italie). Mise à l’eau 2019.